Adaptation du logement 3


La semaine dernière j’ai eu la visite d’une ergothérapeute.
Pour évaluer mes besoins au niveau physique.

C’était la première fois que je rencontrais une ergo dans ce but. Comme j’en ai déjà parlé, j’ai dû moi-même contacter mon CLSC pour demander cette aide, et avant qu’une amie me dise que j’y aurais droit, avant que je fouille sur le site de l’Office québécois des personnes handicapées, je ne savais même pas que j’avais droit à ce type de service. Quand on a besoin d’aide, il faut souvent s’arranger soi-même pour trouver des solutions… c’est encore pire quand on souffre d’une maladie orpheline et invisible comme le syndrome d’Ehlers-Danlos, parce que nos médecins, ne comprenant pas trop la maladie, ne pensent pas aux besoins que l’on peut avoir, et donc aux services qui pourraient nous aider. …rien que cette semaine, en discutant avec mon médecin de famille, qui me suit depuis plusieurs années et qui me considère handicapée… elle est tombée des nues quand j’ai dit, en passant, que j’avais besoin d’aide pour préparer mes repas!

J’avais contacté le CLSC et rempli les papiers nécessaires à la visite de l’ergothérapeute la première semaine du mois de septembre… elle m’a appelé pour prendre rendez-vous il y a environ 3 semaines (donc, 10 semaines plus tard). Et la visite s’est produite un bon 3 mois après le début des démarches.

Cette première visite fut très complète, rassurante et quand même agréable… mais affreusement épuisante. Toute visite sociale, où je dois me concentrer sur une conversation, me demande de l’énergie. Mais ce fut un deux heures de questions et d’informations qui épuisent émotivement en plus.
L’ergothérapeute a fait ce que, selon moi, un bon médecin devrait faire lors d’un premier rendez-vous, et que, sauf mon généticien et mon interniste ont fait (les deux m’ayant beaucoup aidé!), les médecins ne semblent pas souvent faire : le tour des « systèmes ».
Elle s’est assise à ma table avec son laptop et a passé mon corps au crible en voulant savoir tout ce qui ne fonctionnait pas bien (dans le but évidemment de savoir à quels niveaux je pourrais avoir besoin d’aide) : « Avez-vous des douleurs aux jambes? », « Avez-vous de la difficulté à mastiquer? », « Avez-vous des problèmes de concentration? », « Et les mains, ça va comment? ». Des dents aux pieds, en passant par la digestion et l’ouïe, tout y est passé.
Puis elle a demandé à voir tous les contenants de mes médicaments pour bien noter, ainsi que les noms et coordonnées de mes médecins.

Elle a voulu voir la salle de bain de mes parents (puisque j’y prends ma douche et m’y lave les dents, etc) ainsi que la cuisine… mais nous avons rapidement passé la cuisine, puisque je n’ai pas vraiment besoin d’accomodement à ce niveau… soit j’ai la forme pour cuisiner et alors ça va… soit ce sont mes parents qui s’en occupent.

Elle a tout de suite constaté un problème, c’est que pour accéder au reste de la maison (cuisine, salle de bain), il y a des escaliers. Des escaliers aussi pour entrer dans la maison sans passer par mon studio.

Deuxième problème, il y a AUSSI des escaliers pour accéder à ma toilette.
Vu la disposition de la maison, il ne serait probablement pas possible de changer la configuration à cet endroit.

Nous n’avons pas discuté de détails sur le moment, elle a simplement noté le problème.

Puis elle a évalué mon lit, m’a demandé si j’avais de la difficulté à me lever. Je lui ai dit que presque tous mes médecins m’avaient dit que je devrais prendre un lit ajustable (ou à tout le moins « surélever la tête du lit »… tellement facile à dire!).
L’allergiste parce que ça aide avec la respiration… le cardiologue et l’interniste parce que ça aide avec la circulation sanguine… le généraliste qui m’a diagnostiqué la pneumonie, parce que ça aide en cas d’infection des voies respiratoires, évidemment… l’urgentologue après ma dislocation d’épaule parce que ça aide pour une meilleure position… l’interniste aussi parce que ça aide avec le reflux gastrique… et j’avoue que lorsque je dois passer plusieurs jours au lit, ce serait plus confortable.

Elle m’a ensuite demandé de m’assoir dans mon sofa inclinable, et m’a demandé si j’avais de la difficulté à me relever. J’ai dit que oui, mais seulement quand j’étais blessée… qu’en fait je pensais changer de sofa si j’avais un lit ajustable.

Elle m’a ensuite posé quelques questions sur le quotidien, mes activités, mon réseau social, etc.

Et finalement, elle m’a annoncé les mesures qu’elle suggérait.

  • Lit ajustable. J’ai maintenant une prescription de mon médecin, et quelques soumissions, et j’attends le retour d’appel de l’ergo… le gouvernement devrait en payer une partie. Une PETITE partie… mes parents devront payer le reste. Je vais les aider comme je peux. Mais je viens de passer plusieurs mauvaises nuits, entre autre parce que je n’arrivais pas à dormir à plat dans mon lit, alors… Nous n’attendrons plus. Le CLSC pourrait me prêter un lit… mais un lit plus petit, alors je devrais acheter de nouveaux draps, un nouveau chauffe-matelas, de nouvelles housses anti-acarien… je devrais probablement acheter un nouveau matelas de toute façon… et sinon je dois avouer que je n’adore pas l’idée de coucher dans un matelas qui aurait été prêté à un autre avant… sans compter que c’est un prêt, et un prêt lié au CLSC… en cas de déménagement je dois remettre l’équipement et si le CLSC de la région où je déménage n’en a pas, je me retrouve le bec à l’eau. Je préfère investir maintenant et avoir le lit de meilleure qualité, qui m’appartiendra. Ces lits durent longtemps, je pense que ça vaut la peine.
    base-s-cape-de-legget-platt-avec-matelas-orion-de-zedbed
  • Sofa auto-souleveur. Je ne sais pas si je vais l’acheter. C’est très cher et, encore une fois, le gouvernement n’en paie qu’une partie. Je vais probablement suivre mon plan et n’acheter qu’une chaise avec un pouf. En même temps c’est un peu plus petit, ça sauverait de l’espace dans mon studio.
    fauteuil-auto-souleveur-t-165-ergo-black

    Fauteuil auto-souleveur

    602_65097_P

    Fauteuil pivotant et pouf

     

  • Barres de stabilité pour la douche (deux). Celles-là sont remboursées à 100% par le gouvernement. Mais il semble qu’on devra les installer nous-mêmes. Ça va me rassurer d’avoir ça dans la douche. Ce sera mieux que de me raccrocher après le rebord de la fenêtre ou de m’appuyer sur le mur.
  • Banc de douche. Aussi remboursé à 100% par le gouvernement. Nous avons un banc intégré au fond de la douche (en céramique). Alors sur le coup je pensais que c’était inutile… mais c’est vrai que quand je suis très malade, on a l’habitude de rentrer une chaise de patio en résine pour que je puisse me laver. La douche-téléphone se rend jusqu’au banc, mais pas assez pour que je sois vraiment confortable de m’y laver. Donc je vais avoir un banc fait pour ça. Ce sera mieux que la chaise de patio, c’est clair.
  • Aide ménagère. Elle m’a recommandé au service d’aide ménagère de la région et je devrais recevoir un formulaire à remplir d’ici peu, par la poste. Ils vont me faire payer un certain montant par heure, selon mon revenu. Un montant pour le ménage régulier (aux semaines ou aux deux semaines, c’est à voir) et aussi un autre montant pour les plus gros travaux, par exemple le ménage du printemps, laver les fenêtres, etc. Évidemment, ce sera seulement pour mon studio. Mes parents n’y auront pas droit. Mais c’est parfait! Parce que comme ça je ne dépends plus de mes parents pour ça, ils n’auront pas à faire ça pour moi, ils ont déjà assez de leur maison… Et comme mon studio est tout petit, et que mon revenu est minime, ça ne devrait vraiment pas me coûter cher. Ça devrait beaucoup aider mes allergies… et mes parents!

Par contre, est arrivé le moment de me parler de LA grosse modification, et ce fut un gros choc. L’adaptation du domicile lui-même.

Le principe du programme est d’adapter le logement pour que je sois en sécurité et indépendante pour les 5 prochaines années, en considérant « la pire chose qui puisse arriver » dans ma condition. Pour moi, c’est la chaise roulante. Que ce soit une entorse à la cheville qui me met en chaise roulante pour quelques semaines, ou une évolution plus soudaine qui fait que ça m’arrive pour de bon. On s’entend que ce qui est plus probable est une blessure et la chaise roulante pour quelques semaines ou quelques mois. Mais c’est définitivement possible. Rien que l’été passé je me suis blessée au genou et j’ai dû utiliser des béquilles pour plusieurs jours…

Vu la configuration du studio et du reste de la maison. Vu que ma toilette n’est pas du tout accessible (et même en béquilles c’est dangereux… même dangereux en cas de faiblesse, en fait…), vu que mon entrée extérieure (celle du studio) n’est pas accessible non plus (je suis en plein pied, mais il y a un rebord de ciment)… sa suggestion est d’agrandir. D’ajouter quelques pieds derrière… de rallonger la rallonge, finalement (mon studio est une rallonge de la maison).
Ainsi on pourrait faire une salle de bain adaptée, avec douche accessible en chaise roulante. Et « tant qu’à amener la tuyauterie », faire aussi un petit coin cuisine, avec un lavabo et un micro-ondes.
J’aurais donc un appartement complet.

Ce serait le rêve!

Mais… pour que cela se fasse, il faut que l’architecte, avec qui elle va revenir après les fêtes (probablement en février) approuve l’idée. Et ce qui risque de se produire, c’est qu’il s’aperçoive que mon studio ne réponde pas au code du bâtiment et que, donc, nous ne puissions pas participer au programme d’adaptation gouvernemental…
Cette rallonge a été construite dans les années 60… nous serions plus surpris si elle répondait au code du bâtiment, que l’inverse…
Si, par miracle, l’architecte dit que c’est ok et qu’on va de l’avant, il va proposer des plans, et avec ça nous devrons aller voir 2 contracteurs et obtenir des soumissions. Nous devrons aussi obtenir l’approbation de la Ville.
Il est très possible qu’à ce point-là, on apprenne que pour faire les rénovations, on doit ajouter des modifications pour avoir le permis. Par exemple, faire installer une fosse sceptique. Des modifications coûteuses.
Déjà, agrandir ainsi le studio risque de coûter beaucoup plus cher que la subvention gouvernementale. La subvention est d’un maximum de 23 000$. Et la façon dont ça fonctionne c’est qu’ils paient « une partie de ci », « un montant sur cela », etc.
Si les travaux sont évalués à 60 000$, nous n’avons pas les moyens de les payer, même si le gouvernement rembourse une partie!!!

Mais le problème est là… J’adore mon studio et je suis très chanceuse de l’avoir, et j’apprécie cette intimité, cette liberté. Avoir mon chez-moi, mon entrée. Avoir un endroit, en plus, bien insonorisé qui fait que je peux jouer de la musique sans déranger personne, par exemple. Et avoir l’usage de la cour, en été. Je trouve ça génial!
C’est dur à exprimer, dur à comprendre, à moins d’avoir vécu en appartement, puis passé quelques années de retour chez ses parents avec sa petite chambre, comme à l’adolescence.

Par contre, la visite de l’ergo, et les réflexions depuis ces derniers mois, m’ont fait réaliser que si je me retrouve en chaise roulante, même pour peu de temps, ce sera vraiment un gros problème.
On ne peut pas dire « on verra si ça arrive ». Parce que se retrouver complètement dépendant et isolé, même pendant rien que quelques semaines, c’est trop. Surtout quand ça peut être prévenu. Je n’ai pas envie de devoir me faire porter jusqu’aux toilettes. Et je ne pense pas que mes parents en soient physiquement capables. Je n’ai pas envie d’utiliser une chaise d’aisance portable… et je ne crois pas que ce serait très sécuritaire non plus (ça peut basculer, non?).
On a la chance, maintenant, de prévoir le coup…
C’est pas tentant. C’est dur. On préférerait se dire « ça n’arrivera peut-être pas », on préférerait laisser les choses telles qu’elles sont.
Mais si je me ramasse en chaise roulante, même rien que pour quelques semaines, je sais que la détresse que je vivrai sera déjà assez grande que j’aurai vraiment pas, en plus, besoin de vivre la dépendance et la réclusion.

Nous en avons un peu discuté, avec mes parents… et sur le coup mon père a suggéré que, si ça se produit, on échange : on déménage mes choses dans leur salon double, et ils font leur salon dans mon studio, le temps que j’en ai besoin.
Ça ne me tente pas beaucoup… la maison n’est pas du tout insonorisée : si quelqu’un va aux toilettes ou se fait à manger dans la cuisine (à côté du salon), ça va me réveiller. Si je parle au téléphone, la personne dans la cuisine entendra tout. Si j’écoute la télé trop fort, ça pourrait les réveiller! Et pas question de jouer du drum ou de chanter. Mais évidemment, c’est égoïste de penser ainsi… alors je me disais que c’était une bonne solution temporaire… jusqu’à ce que je mette les pieds dans la salle de bain… et que je réalise qu’il est difficile d’y entrer même quand on est seul et en santé. Que je me souvienne combien j’ai toujours eu de la difficulté à y entrer en béquilles… et que ce serait absolument impossible en chaise roulante. En fait, je ne pourrais pas vivre dans la maison en chaise roulante. Il faudrait évidemment faire adapter la maison, pour que je puisse entrer et sortir, modifier la salle de bains aussi, agrandir les cadres de porte… et ça fait beaucoup de modifications pour un arrangement qui ne nous… arrangerait pas tant que ça.

Alors on doit réfléchir à la possibilité de déménager, si l’agrandissement est impossible.
Mais déménager, c’est si on vend la maison… et si on trouve une maison bi-génération (ou facilement adaptable) pour un prix équivalent…

Vous pouvez comprendre, maintenant, pourquoi j’étais si épuisée quand elle a quitté!


Laissez-moi un p'tit mot!

3 commentaires sur “Adaptation du logement

  • Julie F.

    Je comprends tout à fait je vis les mêmes craintes que toi. Question. Avais-tu fais ta demande d’adaptation de domicile avant sa visite (pour le 23000$) ou après? Moi ils m’ont envoyé le document par la poste pour que je puisse l’envoyer avant leur visite car il y a un délai de 6 mois pour la réponse??? Mais j’hésite…. Je pense que je préfère attendre la visite de l’ergo avant afin de m’assurer de ne pas faire une demande inutilement…

  • Annie-Danielle Grenier Auteur du billet

    Il faut envoyer la demande avant, moi l’ergo ne venait pas tant qu’ils n’avaient pas reçu le papier du gouvernement comme quoi mon dossier passait à la prochaine étape.
    Si tu veux que l’ergo vienne juste pour une évaluation d’aide et PAS pour le programme d’adaptation de domicile (PAD – le programme qui va jusqu’à 23 000$), faut le spécifier… et je ne sais pas ce qui se passe dans ce temps-là. Je suis prête à gager qu’ils vont te dire de faire la démarche anyways, comme moi ils m’ont dit de demander le fauteuil autosouleveur même si je ne pense pas le prendre…

  • Julie F.

    Je suis en attente pour les deux en fait Danielle. Pour une simple évaluation et aussi pour l’adaptation de domicile. Je vais attendre surtout que dans le moment je me porte plutôt bien. Merci pour ta réponse 🙂