Je viens de passer une demi-heure étalée sur le plancher de l’entrée.
C’est en grande partie ma faute. J’ai une infection des voies respiratoires, la 3e en 4 mois, peut-être que c’est devenu une bronchite depuis ma visite à la clinique il y a deux jours. Le médecin m’a prescrit des antibiotiques, à prendre au cas où les choses empirent. Je ne les ai pas encore pris, même si la situation s’est détériorée plutôt qu’améliorée depuis. Mais je préférais attendre encore un peu.
Puis, hier, j’ai cuisiné pendant 1-2 heures, j’ai fait une brassée de lavage et j’ai pris ma douche. J’ai même joué du drum pendant presque une heure, malgré la douleur à la poitrine, jusqu’à ce que je me sente faiblir.
Même quand je ne souffre pas d’une infection ou d’un virus quelconque, cuisiner, faire du lavage ET prendre une douche, c’est beaucoup, pour moi.
Mais je suis malade. Cependant, ce n’est peut-être pas la seule explication… peut-être que la seule infection est responsable de mon affaiblissement.
Ce matin, je me préparais pour aller à la fête de mes neveux de coeur, les jumeaux de ma meilleure amie. J’ai manqué leur anniversaire l’an dernier, parce que j’étais trop malade (une migraine, peut-être? je ne me souviens plus), alors je m’étais promis d’y aller. Qu’au pire, je ne resterais pas longtemps, mais que je ferais acte de présence.
Sachant que j’avais cette infection, je m’étais dit que c’est ce que je ferais. Je ne resterais pas toute la soirée, ce qui risquait de trop m’affaiblir… mais j’irais.
Alors je me suis habillée, j’ai écrit les cartes de voeux, j’ai dû monter au 2e étage 3 fois de suite parce que j’avais oublié un chandail, puis un « chou » pour les cadeaux… j’ai aussi parti une brassée de lavage en passant… J’ai dû m’assoir entre deux aller-retour au 2e étage parce que je me sentais les muscles ramollis… un peu frémissants… c’est difficile à expliquer… l’espèce de tremblement qu’on a dans les muscles après un très grand effort… comme quand on a les jambes un peu tremblotantes et « faibles » après avoir grimpé 3 étages en courant (oui, je me souviens de l’effet!)… puis, alors que j’essayais de placer un « chou » sur un des cadeaux… la chute de pression. J’ai juste eu le temps de m’assoir en indien avant de me coucher sur le dos, direct sur le plancher… il y a quelques années, quand j’ai commencé à faire des chutes de pression comme ça, des syncopes, comme disent les médecins, je ne reconnaissait pas les signes, et je tombais carrément. C’est très dangereux, on peut se blesser.
C’est très rare maintenant, j’arrive en général à m’effondrer plus ou moins élégamment. 😉
Ma mère qui était à côté de moi a essayé de m’attraper ou de m’aider… mais c’est arrivé bien trop vite, elle n’a pu que me voir m’écrouler.
Par contre, en habituée, elle a tout de suite été me chercher un petit coussin pour mettre sous ma tête (c’est dur, un plancher!) et un gros coussin pour élever mes pieds… puis une débarbouillette humide pour mettre sous ma nuque. Ensuite de ça, c’est le Gatorade qu’elle m’a aidé à boire avec une paille, parce que, à ce moment-là, je suis si faible que je ne peux pas me servir de mes mains, que mes bras sont comme du bois mort et que je peux à peine articuler ou garder les yeux ouverts.
Quelques minutes plus tard, preuve que c’est courant (encore que, depuis 2010, avec ma médication qui stabilise mon volume sanguin, c’est beaucoup plus rare), elle me dit « pis, c’est le moment de la couverture? », parce que quelques minutes après la chute de pression, j’ai toujours le gros frisson!
Après environ 30min et grâce à tout ça (repos, pieds surélevés, Gatorade, fraîcheur dans la nuque), je suis généralement capable de m’assoir… avec l’aide de quelqu’un. Assise par terre je veux dire. Me relever le dos, quoi! Et alors, ça tourne!
Quelques minutes plus tard, une fois stabilisée, avec l’aide de mes deux parents, j’ai réussi à me lever et à me rendre dans la pièce à côté et m’assoir dans mon LaZboy (mieux qu’un lit parce que j’ai les jambes surélevées).
C’est toujours une manoeuvre dangereuse… j’ai failli m’écrouler à quelques reprises en chemin… et mes parents ne sont pas en super forme, j’ai toujours peur qu’ils se blessent. Mais l’attrait de quitter le plancher finit toujours par gagner! 🙂
Suite à cela, je suis toujours épuisée (dans le sens de : plus que d’habitude) pour des heures, parfois des jours… étourdie… et bien sûr, surtout si la cause de la faiblesse n’est pas réglée… à risque d’en faire une autre.
Et ça voulait dire, pour aujourd’hui, que je devais faire une croix sur ma présence à la fête des jumeaux. Encore une fois.
Ma meilleure amie me dit toujours de ne pas m’en faire, elle comprend. La famille au complet sait que je suis malade et ne m’en tient pas rigueur, ne pensent pas que je me fous des enfants. C’est bien de ne pas devoir se sentir coupable ou de ne pas sentir de pression extérieure… mais je me sens affreusement mal quand même. Ça me fait énormément de peine quand même.
Rater des événements, c’est l’histoire de ma vie, depuis une dizaine d’années. Moi qui était quelqu’un d’absolument fiable, avant. Je suis toujours quelqu’un de fiable, si on parle de ma personnalité! Mais pas de ma santé.
Je ne peux pas me fier sur mon corps! C’est ça, vivre avec le syndrome d’Ehlers-Danlos.
Souvent, ça m’empêche de faire des plans. Depuis trois ans, c’est un peu moins pire. Je me permets plus d’en faire… mais je dois toujours demeurer consciente de la possibilité d’échec, et les gens avec qui je fais des plans doivent l’être aussi. C’est très pénible.
Je ne compte pas l’argent gaspillé en billets de spectacles auxquels je n’ai pas pu assister.
Je n’oublierai jamais, il y a un peu plus d’un an, j’avais une paire de billets pour aller voir la comédie musicale du Lion King à Montréal avec ma mère. Je l’avais vue avec mon père à Toronto au début des années 2000 et je rêvais de la revoir avec ma mère depuis ce temps-là. Je me remettais à peine d’un virus, mais je croyais arriver à me rendre. J’ai fait une légère chute de pression avant de partir. Pas assez pour devoir m’étendre sur le plancher… mais assez pour devoir m’assoir et rester assise quelques minutes… écrasée sur une chaise est plus représentatif. J’ai décidé que je serais OK.
Je conduisais, car ma mère n’aime pas conduire pour aller à Montréal… j’ai fait moins de un kilomètre, et j’ai eu une chute de pression… en conduisant! J’ai juste réussi à me tasser sur l’accotement. Après quelques minutes, j’ai été capable de reprendre la route pour prendre la sortie suivante, arrêter dans un endroit sécuritaire, où ma mère a pris le volant et nous a ramené à la maison… et où j’ai pleuré de rage.
Je manquais ENCORE quelque chose à cause de la maladie! Et quelque chose de très cher à mon coeur, dont je rêvais depuis longtemps, quelque chose qui ne reviendrait peut-être jamais… et on venait de perdre environ 300$. À la place, j’ai passé la soirée dans le LaZboy à ne même pas pouvoir bouger.
Depuis une dizaine d’années, j’ai manqué des fêtes d’anniversaire, des partys, des rencontres amicales, des sorties au cinéma, des spectacles, des trucs sportifs, et j’en passe.
Parfois on dirait que ça tombe toujours quand j’ai quelque chose de prévu. On se dit « on dirait que ça fait exprès! » ou « coudonc, elle s’en sert comme excuse, ou quoi? ». Parce que, après tout, est-ce que je disais pas que j’ai fait ci, et été là, rien que deux jours avant?
Eh bien je dirais que, de un, parfois c’est ma faute… comme je disais tantôt… parfois je devrais prévoir mieux… vivre dans un cocon et essayer de conserver mes énergies pour mettre toutes les chances de mon côté. Si j’ai un souper de famille le samedi, ne rien faire à partir du mercredi, par exemple… mais ça commence à faire beaucoup, c’est difficile… et ça ne garantit rien.
Et puis, est-ce que ça fait exprès? Je ne pense pas, sérieusement, que personne le pense. C’est plus une impression que j’ai, parfois. Mais si je regarde ça objectivement, sans avoir fait de statistiques officielles… je réalise que j’ai raté autant de spectacles que de fêtes de famille, que reporté de sorties magasinage ou cinéma, que passé des journées alitées où je n’ai rien raté parce qu’il n’y avait rien de prévu… autrement dit… sur les 365 journées dans une année, j’en passe beaucoup de merdiques… c’est juste la force des choses que lorsque des événements sont prévus, ma santé ne suive pas ce calendrier.
Ça ne rend pas les choses plus plaisantes pour autant quand ça se produit.
Ce post m’a énormément interpellé car pour moi c’est exactement la même chose depuis quelques années. C’est très difficile de s’adapter à celà 🙁 Je te comprends…
Oui, je trouve que c’est ce qui est le plus difficile. Surtout quand on a l’impression (justifiée ou pas) que les gens ne réalisent pas à quel point il faut qu’on soit au bout de nos forces pour annuler notre présence… qu’on ne s’en sert pas comme excuse.
Mais j’essaie de me parler à moi-même… de me mettre à la place des autres, aussi… que nous dire? À part les fameux « on comprend », « repose-toi » etc, qu’est-ce que je voudrais qu’ils disent? Y a-t-il vraiment quelque chose qui me ferait me sentir mieux? Qui ferait que mon absence me pèserait moins? Pas sûre… Je me sens coupable et peinée de rater les événements, mais eux vivent aussi un malaise, ne sachant pas souvent comment y réagir, même s’ils comprennent vraiment à 100%!
C’est un ajustement, comme le reste…