Être patient professionnel


Je suis un patient professionnel.
Mais nooon. Pas une hypochondriaque qui se magasine médecins et diagnostics! Ça c’est la vision que quelqu’un de mal intentionné pourrait avoir du terme, j’imagine…
Nan, « patient professionnel » au sens où gérer ma santé me prend facilement plusieurs heures par semaine, comme on gère une petite entreprise. Eh non, je n’exagère pas.

Je suis devenue patient professionnel il y a presque 15 ans, je dirais, même si à l’époque c’était moins complexe à gérer et me prenait beaucoup moins de mon temps. Ça a commencé quand mon état s’est beaucoup détérioré, que j’ai commencé à devoir consulter plusieurs spécialistes, demander des 2e ou 3e opinions. À devoir apprendre à m’informer sur mes diagnostics, sur des explications possibles de mes divers symptômes, sur mes médicaments, leurs effets secondaires et interactions possibles.

Au fil du temps j’ai appris qu’on n’est jamais si bien servi que par soi-même. Que si on ne connaît pas son dossier médical sur le bout de ses doigts, qu’on ne comprend pas pourquoi on prend chacun de nos médicaments, qu’on n’a pas les informations à jour de nos maladies, qu’on ne se tient pas au courant des traitements et qu’on ne garde pas copie de nos requêtes d’examen et de résultats… on risque de se retrouver dans le trouble.
Déjà, même en étant bien en charge de mes affaires, il y a des problèmes. J’ai souvent des moments de découragement en me disant « imaginez si j’étais une personne âgée seule et sans éducation ». Une personne qui se fie entièrement sur le système et sur son médecin pour prendre soin d’elle… qui accepte sans poser de questions ce que le médecin lui dit, même si c’est « il n’y a rien à faire », qui prend les médicaments prescrits sans savoir lequel fait quoi, même si on décide de changer trois médicaments par trois autres d’un seul coup, qui n’a pas la capacité de remarquer que la pharmacie s’est trompée dans la dose… L’horreur.

Bref, c’est ça, un patient professionnel. Celui qui est en charge de sa propre santé et dont la gestion de l’état de santé requiert beaucoup d’énergie et de temps.
Prendre les rendez-vous, garder à jour la liste de tous ces rendez-vous et de ceux pour lesquels on doit nous rappeler (afin de contacter les secrétaires pour les rendez-vous qui semblent avoir été oubliés…).
Appeler pour prendre les rendez-vous pour tous ceux avec qui le rendez-vous n’est pas pris automatiquement, sans oublier les rendez-vous réguliers, comme l’optométriste et le dentiste!
Garder à jour la liste des médecins, médicaments et diagnostics ainsi que le dossier médical.
Remplir le pilulier chaque semaine, noter les médicaments qu’il faudra renouveler, contacter la pharmacie, faire le lien avec les divers médecins quand il y a des erreurs ou que la prescription n’a pas été renouvelée avant le rendez-vous suivant (ce qui arrive plusieurs fois par an).
Faire le suivi de demandes d’examen, de prise en charge dans les cliniques spécialisées, de consultation avec de nouveaux spécialistes et avec le CLSC, ce qui implique des envois de fax, plusieurs appels, des rappels après plusieurs semaines… et parfois tout devoir recommencer quand les demandes « ont été égarées ».
Et bien plus… Pas une semaine ne se passe sans que je doive écrire un courriel, envoyer un fax ou passer un coup de fil en lien avec ma santé (généralement, plusieurs).

Depuis trois ou quatre ans, la gestion de ma santé prend de plus en plus de temps.
Pour une bonne, mais aussi pour une mauvaise nouvelle.

La bonne nouvelle, c’est que ça prend plus de temps parce que j’ai un meilleur suivi. Il y a 5 ans, j’avais un généticien, une interniste, un physiatre et un médecin de famille. Je voyais chacun, en moyenne, une ou deux fois par an. Donc entre 4 et 10 rendez-vous par année, je dirais.
Puis, le généticien m’a référé à un neurologue, à un cardiologue et à un endocrinologue (qui a, dans les faits, remplacé l’interniste que j’avais cessé de voir).
L’endocrinologue m’a trouvé un nouveau médecin de famille suite à mon déménagement. Il m’a aussi référé en gastroentérologie.
Grâce à mon médecin de famille, j’ai été vue en rhumatologie et par un nouveau physiatre (je n’ai cependant pas cessé de voir l’ancien! Ils s’occupent de choses différentes). Il m’a aussi référé en dermatologie et en rhumatologie (où je ne suis cependant pas suivie, c’étaient juste des consultations ponctuelles).
J’ai aussi maintenant le suivi en ophtalmologie dont mon amie optométriste s’occupait avant mon déménagement.
L’ensemble de ces médecins (ça fait 9 réguliers!) comprennent bien le syndrome d’Ehlers-Danlos et font un vrai bon suivi… ce qui signifie une visite aux 6 mois ou plus souvent.
On ajoute les prises de sang, radiographies, IRM, CTscans, échographies cardiaques, visites d’urgence en clinique ou à l’hôpital… et en 2017 j’ai eu un rendez-vous médical par semaine en moyenne. 2018 continue de la même façon.

Car la mauvaise nouvelle, c’est que mon état se détériore. J’ai de plus en plus de comorbidités (ces problèmes qui se greffent à la pathologie principale, soit causés par elle, soit simplement « souvent associées », soit juste une coïncidence malchanceuse).
Au départ je n’avais que des migraines et le syndrome d’Ehlers-Danlos (bien que non-diagnostiqué).
Maintenant j’ai une liste d’une dizaine de diagnostics, dont deux sont nouveaux de la dernière année!
Plus de problèmes de santé signifie automatiquement plus de tests, plus de spécialistes, plus de rendez-vous de suivi, possiblement plus de traitements.
J’ai en prime des problèmes encore non diagnostiqués, des diagnostics non expliqués dont on cherche encore la cause (en espérant trouver un traitement), et j’ai eu d’autres problèmes en cours de route (comme cette crainte de tumeur au cerveau et de cancer du sein l’an dernier)… qui ajoutent leur lot de visites médicales!

Alors, moi qui essaie depuis plus d’un an de rattraper le retard de ce blogue, je n’y arrive tout simplement pas, puisque la cadence ne fait qu’augmenter! Je condense certains événements ensemble afin d’accélérer et de rattraper un peu de retard, mais comme vous l’avez constaté, j’en suis présentement en juin 2017, donc avec encore presque un an de retard…

Vous aurez surtout constaté que j’écris bien peu d’articles de réflexion ou d’opinion depuis un certain temps, puisque je tente toujours de rattraper ce fichu retard d’articles de compte-rendu de ce qui se passe au niveau de mon suivi, des traitements et des examens, car je sais que ça intéresse beaucoup d’entre vous!

Je prends cependant la décision de couper à ce niveau.
Je vais continuer de condenser ensemble les événements (plusieurs rendez-vous avec le même médecin, ou un ensemble de rendez-vous et d’examens concernant le même problème médical), lorsque la situation s’y prêtera.
Je vais surtout cesser de vous raconter les rencontres avec mes médecins où rien ne se passe de spécial ou les examens/traitements que j’ai déjà raconté et qui n’apportent rien de nouveau.

Je souhaite arriver à maintenir un rythme d’écriture plus soutenu (j’ai eu une bonne journée et ai écrit plusieurs articles d’un coup, qui paraîtront au cours des prochaines semaines, ce sera ça de pris!), car il m’arrive d’avoir très envie de raconter comment je me sens, ou de parler d’un nouveau diagnostic… mais alors je sens qu’il serait trop complexe de tout mettre en contexte vu le retard, et je me dis qu’il vaut mieux attendre.
Vous pouvez évidemment, en attendant (et en tout temps!) avoir mes courtes réflexions et quelques nouvelles plus fraîches, quoique moins complètes, par la page Facebook!

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